L’esprit chevaleresque des pilotes de chasse Tanguy et Laverdure faisait honneur aux chevaliers du ciel (siècle ?) de la Grande Guerre. Une lecture revigorante en ce novembre flou, avec la dose d’humour nécessaire pour oser regarder l’Europe et le monde dans les yeux.
Tanguy et Laverdure étaient du temps où les « Mirage » et les « Aigles » volaient sans trop se demander comment serait payée la facture de kérosène ou si le principe du « juste retour » deviendrait une théorie du suicide industriel et non plus un ordre (juste ?) de mission. Ils (se) diraient que c’est un peu étrange, voire dangereux, que les rampants Européens se tirent dans les pattes pour échanger des avions plus ou moins made in chez eux contre du pétrole tombé du ciel chez d’autres mais qu’autres temps, autres moeurs et que si l’Europe dispose de 4 ou 5 pays qui fabriquent des chasseurs et s’il y a encore des peuples qui en ont envie et auraient les moyens d’en acheter avec sièges en cuir comme dans les 4-4 diesel à correcteur de trajectoire automatique et radar anti panneau pédagogique, c’est au moins un signe de vigueur économique, sinon un indicateur de progrès de la civilisation.
Tanguy et Laverdure étaient du temps où les pilotes de chasse aux bons états de service se reconvertissaient en chauffeurs de bus volants sans trop d’états d’âme pour laisser la place aux jeunes en attendant de prendre une retraite bien méritée. Il (se) diraient que c’est un peu compliqué, voire dangereux pour tout le monde quand les vieux pilotes plus ou moins talentueux et plus ou moins amortis ne veulent pas lâcher le manche et exigent des salaires et/ou fromages de vieux politiciens gradés et les avantages sociaux y afférents mais qu’autres temps, autres moeurs et que du moment que les
BRICS djeuns manifestent pour remettre un peu d’ordre dans le ciel et que l’Europe ne se suicide pas comme d’hab’ qu’Air France n’est pas trop en grève, le Cap est fixé et les civils seront bien gardés même si ça dégrade un peu le pouvoir d’achat de trucs inutiles pas durables et made in ailleurs à bilan carbone pathétique pour quelques Noëls à venir.
Tanguy et Laverdure étaient du temps où Dubai n’était pas encore une superbe marina à yachts pour 0,01% entourée de buildings high-tech (pas tous encore très remplis, dit-on) pour 1% dominés par une tour haute comme trois Tour Eiffel que les 99% peuvent visiter grâce à un ascenseur social ultra-rapide (sur réservation) mais aller-retour. Ils se diraient qu’on aurait probablement pu imaginer une civilisation du partage et de la gestion raisonnée des ressources naturelles qui n’aboutisse pas à un transfert massif de richesse des bas de laine européens parfois coupables vers les fonds pétroliers souverains pas toujours responsables mais qu’autres temps, autre moeurs et du moment que les tu(m)eurs financières ne métastasent pas trop dans l’économie réelle et que les interventions militaires ramènent des démocraties apaisées dans les sables …
Tanguy et Laverdure étaient du temps où le Bourget était encore le coeur battant des faucheurs de marguerites, des enfants de Lindbergh et autres inventeurs de lignes aériennes. Ils se diraient que c’est un peu surprenant que ce soit devenu un musée et une gare pour exilés fiscaux volant(s), cadres supposés supérieurs d’entreprises vivant sur un grand pied en marchant sur ceux de tout le monde, et autres touristes et oisifs très riches, en dehors de la semaine « Salon » (du Bourget, pas de Provence) une fois tous les deux ans. Et que c’est déstablisant que le salon aéronautique de Dubai de mi-novembre se prépare à devenir un (le ?) centre du monde quand l’industrie, la maintenance et le transport aérien y auront bien délocalisé sous le soleil et quand il y aura assez d’hôtels autour et/ou qu’on pourra y faire un aller-retour pour la journée avec l’une ou l’autre des méga compagnies aériennes des Emirats depuis les nouvelles puissances économiques ou en TGV (made by Spain), mais qu’autres temps, autres moeurs, du moment que les apparatchiks n’interdisent pas les démonstrations en vol au Bourget et finissent par trouver une solution contre les embouteillages.
Tanguy et Laverdure datent d’un temps que les 20 ans ne peuvent pas connaître où Rocard était écouté même si personne à gauche ne votait pour ses idées et où le nucléaire était moins contesté parce qu’il y avait un genre de consensus de gauche à droite et vice-versa pour une certaine idée de la France et pour ne pas perdre la guerre froide après avoir déjà largement foiré toutes les autres depuis Bonaparte. Ils (se) diraient que c’est consternant que les TV se passionnent, entre deux sitcoms et un train de publicités, pour un groupuscule contestataire resté à de vieux éléments de langage de la Pravda traduits en français du siècle dernier par Greenpeace, alors même qu’on a arrêté d’atomiser Mururoa depuis longtemps, qu’en vouloir à Fukushima la privée alors qu’on se fichait de Tchernobyl la communiste est un peu « deux poids, deux mesures » et que tout le monde semble vouloir des bagnoles électriques par consensus sinon référendum. Mais ils penseraient que c’est moins grave pour la France que de ne pas être membre de l’APEC (pas l’ANPE des Cadres, le G20 du Pacifique) alors que c’est un de ses honneurs de ne pas avoir trop saccagé la Polynésie française.
Tanguy et Laverdure, bien que bons soldats disciplinés et respectueux des institutions, mélenchoneraient peut-être un peu quand même que c’était bien la peine d’avoir vaincu la plupart des moyen-âgismes en un petit millier d’années de batailles pour la construction d’une France et d’une Europe sinon des Lumières, au moins généreuses et sorties des obscurantismes, pour dilapider le sang des ouvriers de Billancourt par-delà les Carpathes (ou Gibraltar) avec autant de sourire niais que quand un porteur de chaussures sur mesures se jette un sac de riz par-dessus l’épaule ou quand un ré-enchanteur du pouvoir d’achat se promène en pédalo dans un bassin électoral sous les applaudissement des sondages, et laisser les vampires de la finance privée et leurs donneurs d’ordres faire tandem avec les dépensiers de l’administration supposée publique pour renverser les matelas et vider les bas de laine des honnêtes gens.
Le ciel, le plus bel endroit du monde …
Renaud Favier – renaudfavier.com – musique ! – 14 novembre 2011
Ps : Tanguy et Laverdure (se) diraient que c’est dangereux de naviguer, même aux aux instruments, dans la brume quand il suffit d’un lapin-crétin qui circule n’importe comment avec un permis de conduire volé au volant d’un véhicule emprunté, ou vice-versa, d’un pirate informatique plus ou moins bien intentionné ou subventionné pour dérégler les altimètres aussi sûrement qu’une berlusconerie peut faire disjoncter des agence de notations globales, et quand on ne sait pas vraiment combien de carburant il reste dans les réservoirs ni combien de milliards il faudrait économiser pour rester co-pilote de la zone Euro-Mark sinon Double Bang triple A, au moins capable de payer les intérêts de la dette.
C’est fini pour aujourd’hui, parce que si on veut profiter du ciel bleu, il faut y aller.
D’autant qu’il ne s’est pas passé grand chose sur Twitter depuis samedi.


























































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