C’est un métier, le (commentaire de) spectacle politique, et ici à Paris et maintenant au début du 21è siècle (avant et/ou ailleurs, et/ou vice-versa, les spectateurs ne ruminaient/ruminent pas leurs pop-corn plus ou moins discrètement assis dans le noir, ni ne croquaient/croquent un sandwich au saumon bio arrosé de champagne responsable debout à l’entracte, mais se repaissaient/repaissent plus ou moins élégamment et discutaient/discutent dans les positions qui leur plaisent de ce qui leur plait pendant que les joueurs jouent et/ou amusent), c’est plutôt après le baisser de rideau que le spectacle commence.
En globisch de maintenant, on ne dit plus « artiste », parce que le français n’est plus la langue du monde civilisé et qu’un mot hermaphrodite contrevient à l’ambiance totalitariste qui impose de choisir son camp camarades, ni même « artist », pas seulement parce que le producteur du film (muet) oscarisé éponyme n’est plus en cour suite à une présomption de méconduite grave, sérieuse et répétée envers des personnes en situation d’infériorité autoritaire, on dit « performer »‘ (comme dans le biopic sur Freddy Mercury avec un sosie convaincant et une bande-son épatante, forcément épatante), et ça a l’immense avantage de permettre d’utiliser le même mot valise autant pour les artistes de tous genres, culturel, politique, sportif, militaire, industriel, financier, youtubeur, tiktokeur etc etc etc …
Mais je digresse (dis Grèce ?), et personne n’a trop le temps de lire des phrases interminables en poupées russes alors que le spectacle des, non, pas des Cosaques du Don, quoique … des marionnettes sans visage de Kiev sera bientôt remplacé par d’autres images télégéniques, d’autres commentaires de presse (les mots ont un sens, on est pressé chez ces gens-là), d’autres agitations politiciennes par procuration …
Bref, si vous voulez comprendre ce qui est en train de se passer à la frontière entre l’Ukraine et la Russie, jetez un oeil à la carte ce-dessous en traçant une ligne imaginaire entre la capitale de Pierre le Grand et Odessa, sinon allez voir ce qui se raconte dans Twitter ou Facebook avant qu’on y soit passé à autre chose, un spectacle de foot, un match de sondage, ou un fait divers à Paris ou orbi.

La bonne nouvelle, qui devrait nous être annoncée par l’ONU ou par le Premier Ministre si l’un ou l’autre finissent par ressortir de leur silence assourdissant, c’est que les chars russes ne sont pas (encore) à Paris, ni les canonnières de tel ou tel Empire devant les ports de Formose, dans les détroits de telles ou telles Dardanelles, ou en situation. de tel ou tel Trafalgar …
Renaud Favier – Paris, 22 02 2022 (date palindrome, amusing, nicht ?)
PS : texte posté sur Facebook le 22 février à l’heure du café, parce que les consommateurs de café du matin à Paris se sont raréfiés cause virus chinois et autres réalités d’ici, maintenant, et (em)pire(s).
Bref, les experts en ceci ou cela des plateaux (honni qui « de petits fours » y mépense) TV parisiens et autres comités de rédaction vont commenter en direct ou léger différé jusqu’au prochain sondage ou match du PSG les tenants présumés et aboutissants imaginables de la séquence de télé-réalité diffusée par TV-Moscou après la cérémonie de clôture en mondovision des Jeux Olympique de Pékin, et quelques politiciens en campagne électorale ou préparation de mid-terms vont s’agiter virilement face caméra et envoyer quelques collaborateurs diplomates et militaires en interview, tandis que quelques Ukrainiens émigrés au Canada vont crocodilarmoyer médiatiquement pour leur cher vieux pays et quelques investisseurs occidentaux dans les terres agricoles ukrainiennes ou les valeurs boursières liées au gaz russe s’inquiéter entre-soi pour leurs portefeuilles, mais la non-guerre du Donbass est finie depuis longtemps sur le terrain, la guerre mondiale ne sera pas déclarée pour quelques provinces d’Ukraine dont on ne sait même pas si elles sont stratégiques pour telle ou telle ressource naturelle ou voie de communication vers un port maritime important, et il va y avoir quelques réunions à l’ONU et tractations de couloir pour préparer les prochains épisodes de la série « Le Grand Jeu », étant entendu que si l’occident avait voulu, ou pu, faire émerger une démocratie viable, sinon un pays et une élite crédibles en Ukraine, et si les USA n’avaient pas des paquets dingues de gaz de schiste à exporter et d’autres priorités que les restes du monde d’avant-hier, peut-être Poutine aurait-il eu plus de mal à rebattre les cartes entre Saint-Petersbourg et Odessa (ça vaut le coup de regarder une planisphère, pour comprendre pourquoi Fredo le Grand, Cathy la mécène de Voltaire, et quelques autres dirigeants lucides d’avant et après eux tenaient à pousser le rideau vers l’Ouest au Sud de Moscou), mais que sauf à trouver/fabriquer des images chocs de petits enfants martyrs et/ou des témoins télégénique d’un génocide et/ou des migrants anglophones aux éléments de langage et cicatrices boulversifiants, ça ne va pas être facile de faire très longtemps assez d’audimat avec les marionnettes sans visage de Kiev pour les agences de pub et les médias dépendant de ventes à de vrais clients et de recettes publicitaires plus que de subventions étatiques et abonnements d’administrations vont inévitablement nous reblablater bientôt de la santé de la Reine d’Angleterre ou du locataire de la Maison Blanche, de la condition physique de telle ou telle vedette de foot ou de sondage électoral, ou de la date limite de validité du QR-Code et/ou du vaccin contre tel ou tel variant du virus chinois.
Si je m’écoutais, plutôt que de laisser Youtube me choisir des chants cosaques, je gratouillerais un bout de billet de blog, mais au mieux telle ou tel stagiaire de rédaction me chiperait les « marionnettes sans visage de Kiev » pour un quart d’heure de postérité, au plus probable ça serait noyé dans le bourbier médiatique du jour …