Mots (maux ?) mythiques

Qui penserait que la Grande Nation du Minitel, de Mireille Mathieu, des Mendès et Mitterrand aime exclusivement le « M« , sous-estimerait le vocabulaire de la République des Mots (Maux ? Mox ? Morts ?). Qui ne sait plus guère compter, mais c’est une autre histoire.

En tout cas, avec ou sans réforme de la grammaire politique grâce à l’invention des questions préalables de constitutionnalité pour compléter l’arsenal du principe du « responsable mais pas coupable » qui lui-même avait effacé les très surannés vrai-faux passeports et autres non-lieux de (compl)aisance ; avec ou sans révolution de l’orthographe politicienne (en principe acquise en sortie de primaire) qui gomme les paragraphes des accords (désaccords ?), parachute les nouveautés au plus près de l’Académie Française et se mox un peu des règles de base de la grammaire (et ?) de la res-publica ; avec ou sans mathématiques budgétaires modernes selon lesquelles un état en faillite est « AAA » comme un rigoureux champion du monde, un budget chroniquement déficitaire est une promesse de succès électoral et un surendettement à la limite de l’incontrôlable est une délicieuse liaison dangereuse avec les diables de la finance … la politique française décline … ses fondamentaux de A à Z.

Ascenseur social : slogan du 20è siècle en principe aussi excitant et mobilisateur que « Liberté, Egalité, Fraternité » d’antan mais jamais assez rapide pour les diplômés des Ecoles d’Aristocratie (ENA, IRA etc) et moins populaire dans le sens de la descente.

Bilan : rapport d’activité tout à fait inadapté aux (in)compétences des notables pour lesquels on a inventé le bulletin de vote à la place de ceux de notes et acheté des fiches d’entretien annuel et RGPP-ries à des cabinets de conseils pour moderniser l’Etat.

Capitale : fascinant et un peu mystérieux miroir aux alouettes pour rastignacs provinciaux du temps jadis, point de (para)chute pour ambitions plus ternes des temps modernes, la ville lumière fait un peu de peine (capitale, of course) et en a (à peine ?).

Durable : cf Développement, mot tarte à la crème qui contrairement à son sens n’a guère duré pour avoir gravement contrevenu à la politique réelle, au court-termisme des échéances électorales et au réalisme de politiciens achetant leurs mots aux lobbies …

Emploi : paradis artificiel promis par les dealers pour compenser la pénurie de LSD, la cherté des opiacées et la baisse de qualité du THC. L’Etat en fournit mais c’est plus cher et moins bien que le vrai job du privé en général, sauf pour des fromages républicains.

Femme : jusqu’ici, à part Angela Merkel vraiment trop coiffée à la Berlin-Est et Christine Lagarde trop bien habillée pour l’hiver par ses amis plus encore que ses ennemis, rien n’a prouvé qu’elles peuvent être le grand remède 2.0 aux grands mots maux de la politique.

Génération « Y » : on n’est pas obligé de regarder les poches de leurs jeans qui tombent comme celles sous les yeux d’un électeur idéaliste, ni juste au-dessus comme un politicien dérangé (qui devrait se ranger) : dans les Y…eux et honni qui mal (mâle ?) d’Y pense.

H : malgré la mort de Bob Marley il y a déjà un bon moment et le médiocre bilan  carbone des lampes à infra-rouge pour cultiver en salle de bain, le « H » reste un  marqueur pour attirer les électeurs contestataires, comme Hadopi et le mariage Homo.

Intérêt Général : le « Livre » de toutes les religions politiques. Au nom duquel quelques cathédrales furent construites, comme le suffrage universel, mais les guerres de religions ont insulté trop d’intelligences, piétiné le réel et écrasé trop d’hommes de bonne volonté.

Je vous ai compris : le « Amen » de la politique française. Placé au bon moment de la messe, tout le monde s’embrasse comme #PS et #EELV avant le Typex sur le Mox, mais s’il y a des arrière-pensées ou pire si pas affinités, les paras vert-kaki ne sont pas loin.

KKK : Karl (Marx), Keynes et Kennedy sont les référents de la rive babord de la politique à la française à l’ancienne depuis que Dieu, Jean-Paul Sartre et le made in France sont morts, qu’on ne trouve plus rien à la Samaritaine et que BHL est passé à l’autre bord.

Lendemains qui chantent : le « demain on rase gratis » des politiciens professionnels, généralement plus intéressés par leur avenir que par celui des autres et plus discrets sur leur passé que sur celui des autres, et jamais avares d’un refrain du bon vieux temps.

Marine : entre le Charles de Gaulle sans hélice, le France, Seafrance et la le Pen, la relation de la France avec la « Royale » n’est plus ce qu’elle était du temps de Surcouf, Tabarly ou la Jeanne. Mais l’enfant de la patrie de la liberté toujours chérira sa mère.

Non ! Depuis la mort de Voltaire (polémiste du 18è -siècle, pas arrondissement-, pas promo ENA en route pour 2012) qui préférait que d’autres disent « non » plutôt que crier « oui » lui-même, le vote « contre » paye politiquement plus que le « oui » en général.

Ogmentation : du temps des ingénieurs à la Eiffel, tout coûtait déjà toujours plus cher que prévu et arrivait plus tard qu’espéré genre Concorde, et vice-versa, mais depuis qu’il y a une chaire d’ogmentologie au CNRS, ça va de mal en pis de vache à lait (laid? chalet?).

Participation : troisième voie mise au garage à la demande majoritaire (on pourrait dire « générale » mais ce ne serait pas un bon mot) parce que ça ne marche nulle part, même dans des pays où économie et politique ne sont pas dirigées par l’Education Nationale.

Quand les poules auront des dents, la démocratie sera réelle, la République exemplaire, l’Etat et ses sous-états modestes, les élus respectables et respectés, sinon réélus dans leurs fiefs ou fromages ad vitam aeternam. En attendant (Godot ?) jusqu’ici tout va bien.

Réferendum : genre de Golem comme le pouvoir d’achat, de monstre de Frankenstein de la démocratie, puissant mais délicat à maîtriser si l’on ment aux citoyens électeurs plus mal, ou moins, ou plus, ou différemment, ou pas, qu’aux échéances électorales ordinaires.

Service Public : genre d’auberge espagnole à tarifs réglementés pour citoyens plus exigeants que contribuables, que l’on finance maintenant par partenariat public-privé ou emprunt en franc suisse à taux variable selon la couleur souhaitée pour le cache-misère.

Téléphone rouge : symbole du standing des « zélus » de hautes (ir)responsabilités mondiales, moins émouvant que le Maroc maroquin du temps de Ferry (Jules, pas le médiacrate) mais plus élégant au 21ème siècle que le portable dans les grands hôtels.

Unité : LE fondamental pour toute noble ambition politique au pays des 365 fromages (au sens littéral, pour les autres, il y en a nettement plus et ils coûtent plus cher au kilo, hélas) et des poussières d’Empire sur lequel le soleil ne se lève jamais en même temps.

Vaste Programme : comme toutes les promesses politiques, on en parle toujours mais on ne le fait jamais. En politique parce qu’il faut garder du stock de promesse pour l’élection d’après, en pratique parce que ce serait dangereux, on est toujours le c… de quelqu’un.

Win-Win : version moderne du « la prospérité est au coin de la rue » des années 30, personne ne l’a jamais vu, personne ne comprend par quel malentendu ça pourrait marcher mais ça rassure, ça fait moderne et c’est les éléments de langage pour 2012.

X : no comment, il y a longtemps que la France a fait une croix sur les gauloiserie à la Félix Faure et dépassé les désordres amoureux de l’heure du laitier ou des appartements dits de fonctions. Le temps des professionnel(le)s de la politique est venu, c’est ainsi.

Yaka Fokon : les notables parlaient trop (bien) pour les médias et les candidat(e)s n’écrivaient pas assez (bien) leurs bouquins. La médiacratie s’est inventé des champions de France 2.0 genre Morano ou Douillet d’un côté, Mazetier ou Montebourg d’un autre.

Zorro : en France, on a une certaine idée de l’homme providentiel depuis Bonaparte, les taxis de la Marne et Henri Salvador. C’est à consommer avec modération, cela peut nuire à une certaine idée de la France, de la République et de la démocratie. Comme en 40.

Aux grands mo(r)ts, le grand remède ? Les hommes de peu de mots (maux ? mox? mots passants ?)  sont peut-être les meilleurs, même s’ils savent très (trop ?) bien écrire …

Mais comment faire de belles promesses « à la de Gaulle », de beaux discours « à la Malraux », de la bonne politique à la Rocard ou Pompidou ou même un vaste programme un tant soit peu solide en 140 caractères sur Twitter ? La politique française sera 2.0 ou ne sera pas, ça libèrera du temps pour les vraies publicités à la TV et dans les magazines en papier glacé mais ce n’est pas nécessairement ce qui améliorera le vocabulaire ou le sens de l’humour de nos politiciens, les moeurs la grammaire des affaires de la politique, la notation chez Moody’s ou Standard & Poors l’emploi ou la grandeur de la France si les zélus (mé)font en 2012 et après comme d’hab’ et si les zélecteurs (re)veau-tent en 2012 et plus si affinités comme d’hab’, pour un vaste programme plus ou moins commun sur lequel tout le monde pourra s’asseoir dés le lendemain de la signature des élections.

RF

Renaud Favier – renaudfavier.com – musique ! – 17 novembre 2011

          
          
         
 
       

12 commentaires pour Mots (maux ?) mythiques

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