Il existerait des endroits fantômes nommés « marchés », « Syrie », « Sofitel », « Tripoli », « France ». Il y aurait même un aéroport flottant de temps à autres en Méditerranée. On pense à Churchill et ses tanks gonflables pour berner les ennemis mais ça ne rassure qu’à moitié.
Pour les marchés, on a déjà vu le film, ça monte et ça descend parce que des jeunes et les prédateurs de leur écosystème cherchent à gagner très vite plein de fric sur tapis vert sans rien produire de beaucoup plus utile que du spectacle TV pour vendre des écrans publicitaires pendant que les experts duement salariés commentent les actions qui attaquent ou défendent, montent ou descendent, gagnent ou perdent entre deux mi-temps comme s’il s’agissait de foot, de poker sur internet ou du dernier spot de Cantona pour ou contre un déodorant ou une banque. C’est comme « The Others », on ne sait plus très bien qui sont les fantômes à la fin, parce que quand le monde dit « réel » apparait tremblant et flou assis devant sa TV face aux autres écrans, ce n’est pas l’annonce de sortie du placard du cadavre de la taxe Tobin momifiée depuis 1972 ou les menaces sur les paradis fiscaux qui vont couler les armadas de vaisseaux fantômes de la finance. Marre des images de traders à bretelles sur chemises rayées, présomption de non-lieu et on n’en parle plus pour la planète finance sauf si on peut filmer des gusses un peu connus qui sautent du toit de leur banque à Wall Street.
Pour ce qui concerne la Syrie, les plus vieux fans de l’ORTF se souviennent vaguement qu’un ancêtre du souverain actuel avait plus ou moins vassalisé le Liban entre la Séquence du Spectateur et Sept sur Sept quand Anne Sinclair ne bossait pas encore à temps plein comme assistante de DSK mais que déjà Beyrouth n’était plus sous notre protectorat, mais on ne sait plus très bien s’il fallait être pour ou contre parce comme il n’y a a priori pas de pétrole en Syrie et que là-bas les Indiens et les Cow-Boys étaient habillés pareils et armés par les mêmes et qu’en plus il y a plus ou moins toujours une guerre dans le coin au nom de vieux fantômes de toutes sortes et toutes religions, il vaut mieux faire comme si on ne savait pas d’autant que la dernière fois qu’on a voulu fouetter un Shah dans le coin, ça ne nous a pas trop réussi et que s’il fallait s’énerver à chaque fois qu’il y a un pogrom à l’Est de Strasbourg, on n’en finirait jamais. En plus, on n’a pas d’images intéressantes : présomption de non-lieu à Damas sauf si on peut filmer des enfants assassinés en direct, des mômes soldats éructants armes à la main ou BHL au Raphael avec un gouvernement fantôme en exil.
Pour le Sofitel, c’est assez sympa de la part des publicitaires d’avoir un peu renouvelé le genre de la pub pour les grands hôtels pour riches d’avant la crise où on ne va jamais si on doit payer mais dont on est contents qu’ils aient de belles piscines et des machines à cirer les chaussures et plus si affinités à tous les étages, et c’est de bonne guerre d’avoir cherché à faire un peu de notoriété pour Sofitel face à la très médiatique Paris Hilton et super sympa d’avoir fait un casting avec du vrai personnel et de vrais clients, mais au 102ème jour de télé-réalité entrecoupée de publicité mensongère, on approche un peu de la saturation et ce serait cool si #PS trouvait un autre truc pour animer la rentrée de ses primaires. Présomption de non-lieu sauf si #DSK décidait de faire un duplex avec La Rochelle depuis le Sofitel ou son penthouse à New-York (sinon, si l’iPad n’est pas assez puissant, le moins cher serait peut-être d’utiliser le studio de vidéo conférence du FMI ?) ou si un revenant crédible et photogénique hantait les couloirs de Solférino.
A Tripoli, les fils de Kadhafi annoncés prisonniers apparaissent souriants à la TV parmi des groupies pour l’un, se serait « échappé » pour l’autre, mais ce sont des fantômes de 2nde classe, ça occupe le JT du matin mais ça ne fait pas d’audimat durable. Il faudrait que le leader maximo du désert réapparaisse flambant neuf à son balcon déguisé en général Alcazar pour que les TV puissent caser autre chose autour de lui ou des discours des politiciens libyens que les vieilles publicités pour les défibrilateurs made in China ou la vente de bijoux de famille par correspondance, ou alors un retournement de situation genre « le piège de Tripoli se referme sur les rebelles qui ont avancé trop vite et trop loin comme Napoléon à Moscou » mais les experts ont du mal à nous y faire croire tandis qu’une fin déjà vue cent fois genre la fuite en avion comme dans « Casablanca » ou en hélico comme l’évacuation de l’ambassade US au Vietnam avant l’arrivée de Rambo, ça ne ferait pas beaucoup d’audimat au 21ème siècle. Un remake de la série sur la fin de la guerre contre Saddam Hussein saison 2 est possible mais Kadhafi a aussi vu le film et ce serait le prendre pour plus affaibli intellectuellement qu’il ne l’est probablement de penser qu’il se laisserait coincer dans un bunker ou un trou à rat alors qu’il a eu 42 ans pour se construire quelques tunnels et s’acheter quelques 4-4 pour rouler loin de BHL si ça tourne trop vinaigre pour les kadhafistes et que le Conseil National encore un peu fantôme n’accepte pas de lui accorder un genre d’exil doré. Présomption de non-lieu, on peut oublier Tripoli sauf si on retrouve l’hélice du Charles de Gaulle et qu’on peut l’envoyer sur place pour faire de belles images avant que les publicités américaines n’aient recouvert toutes les façades du port.
Sinon, le Royaume du non-lieu se prépare doucement à émerger de l’été : Paris-Plage a fermé ; Bourdin naturellement bronzé a invité lundi le Leader du « shadow gouvernement orange » pour reprendre en douceur et mardi le Président du parti Radical du centre pour évoquer l’affaire OM-VA au cas où il y aurait eu du nouveau pendant les absences de tout les Gaulois (il n’y a pas, c’est comme pour l’affaire Tapie ou les candidatures des centristes, ça attendra après les universités d’été des uns et des autres, priorité à la mise à jours des powerpoint avec les nouvelles statistiques de l’emploi selon les derniers sondages) et le fantôme de l’équilibre budgétaire aurait été aperçu par un fan d’OVNI mais comme personne ne l’avait revu depuis avant l’Avenir du Futur on n’est pas très sûr que ce ne soit pas un communicant politique à la recherche de sa voiture noire trop rapide garée encore plus n’importe comment au mois d’août et la presse mondiale commente plutôt le voyage de Biden à la chasse au rééquilibrage commercial en Chine ou les tribulations d’Angela Merkel à la Bundesbank. Les nostalgiques de la Grande Nation peuvent fouiller internet au cas où il se serait passé quelque chose quelque part entre Monaco, Londres et Luxembourg mais à part la visite d’une déchetterie près de Clermont-Ferrand par Eva Joly, les actualités des tribus gauloises n’agitent guère les réseaux sociaux et ne paniquent pas trop les agences de notation. Présomption de non-lieu au village, ça se passe ailleurs.
Il y a des lieux qu’on qualifie « d’aisance ». Cela sonne comme « décence », mais c’est différent, de même que « non-lieu » ne signifie pas exactement « rien ».
Renaud Favier – renaudfavier.com – en avant la musique ! – 23 août 2011
Ps : non, on ne sait pas quel livre genre « la Communication Politique pour les Nuls » religieusement lu pendant les vacances par les stagiaires des agences de lobbying recommande la cravate bleu ciel que portent sur chemise blanche tous les politiciens gaulois bronzés qui veulent imiter François Fillon devant une caméra pour la pré-rentrée.
C’est fini pour aujourd’hui, il n’y a pas lieu d’en dire plus.









