Tintin, qui est plus du temps d’Albert Londres que de celui de Michel Denisot, devrait se pincer pour en croire ses yeux et oreilles s’il regardait les « nouvelles » à la TV. Lui qui alla sur la lune voir s’il y était se demanderait ce que devient le sens de la vie du monde d’en-bas.
Tintin est d’un temps où le rêve américain n’était déjà ni parfait, ni subprime, mais où lorsqu’on songeait à New-York, c’était pour espérer l’ONU, pas pour regretter Wall Street. Il (se) dirait que c’est une bonne idée de réparer la statue de la Liberté.
Tintin est d’un temps où déjà les mirages n’étaient plus ce qu’ils étaient dans les déserts, mais où lorsqu’on cherchait de l’eau dans le sable, on risquait plus de trouver du pétrole que des fleuves de sang. Il (se) dirait que ce n’est pas gagné, ces révolutions du jasmin.
Tintin est d’un temps où déjà le fond des mers n’était plus très frais, mais où lorsqu’on chassait la licorne, on ne tombait pas sur des requins fukushimés agonisant nageoires coupées. Il (se) dirait qu’on aurait pu inventer des rites aphrodisiaques moins barbares.
Tintin est d’un temps où l’OMC et l’ONU n’avaient pas été inventées et où les coups de pied au c… étaient le mécanisme traditionnel de résolution des conflits. Il (se) dirait qu’on a les pieds où on pense qu’on (m)hérite mais que pied pour pied, c… pour c…, c’est pas fini.
Tintin est d’un temps où la Ford T faisait rêver (monsieur tout) le monde. Il se dirait que ce n’est pas progrès très décent de dépasser les limites de vitesse avec un tracteur tue-l’emploi immatriculé dans un paradis fiscal pour se garer sur une place pour handicapé.
Tintin est d’un temps où la jungle faisait un peu peur au enfants, mais comment aurait-il pu imaginer qu’on génociderait les tigres pour cultiver de l’huile de palme pour boeufs ou des tourteaux de soja pour vaches ? Il (se) dirait que le vert n’est pas ce qu’il devrait être.
Tintin est d’un temps où l’Europe était déjà encore n’importe quoi mais où on n’avait pas rajouté une couche de députés à 14 000 Euros le mois à temps partiel à Strasbourg. Il se dirait qu’il temps de réfléchir au fédéralisme démocratique, à l’Euro(pe) à visage humain.
Tintin est d’un temps où les médias ne recevaient pas tous les mêmes éléments de langage par e-mail envoyés par des communicants en Porsche. Il (se) dirait que c’est bien que des journalistes puissent aussi penser, twitter, parler avec de vrais gens et sortir voir.
Tintin est d’un temps où il ne serait venu à l’idée de personne en Europe de se tirer une balle dans le pied, voire de s’amputer en s’indignant contre tout et son contraire jusqu’au sapin de Noël. Il (se) dirait que certain(e)s pourraient moins parler pour ne rien dire.
Tintin est d’un temps d’avant les réformes de l’orthographe, DSK et Yannick Noah mais où déjà on sursautait en lisant son journal, entre les viols et assassinats de récidivistes, les va-et-vient politiques ou boursiers, les dommages de guerres économiques ou pas etc.
« Corne de bouc !« , comme lirait ; élirait ; médirait (se) dirait l’autre.
Renaud Favier – renaudfavier.com – musique ! – 20 novembre 2011
Ps : Tintin a beau être d’un temps où l’on disait moins n’importe quoi sur le péril chinois tout le temps, ou plutôt ou n’importe qui n’avait pas l’occasion de chinoiser sur n’importe quoi dans un micro, il lui arrivait aussi de (se) dire n’importe quoi en (aux ?) chinois.
C’est fini pour aujourd’hui, parce que « quand faut y aller, faut y aller » et parce qu’il faut la vie continue ne serait-ce que par solidarité avec la pauvre môme violée et assassinée parce que la famille d’un jeune désaxé et la loi d’une société plus sourcilleuse sur la vie privée des délinquants de tous bords et tous âges et la maison de tolérance des non lieux dangereux que sur la vie réelle des vrais gens et l’avenir des jeunes sans trop d’histoires ou de famile ont voulu donner une deuxième chance à un gamin sorti des clous quitte à mentir au moins par omission. La môme n’en a pas eu et n’en aura pas, elle, de (deuxième) chance.
Surtout que le lundi matin, il n’y a guère de scoop sympas à attendre de Twitter.
.
Renaud Favier : Café du matin à Paris 
Ping: Mad in France ! Qu’en dirait-on … à London ? | Renaud Favier : Café du matin à Paris