Les Alpes, des éléphants, Carthage, des rivalités … une plume inspirée par une certaine idée de la civilisation autour de la Méditerranée pourrait s’amuser à ressusciter Hannibal entre les lignes du discours du Président an Savoie. D’autant que la Tunisie est sous les caméras.
Hannibal aussi a tribulé dans les Alpes et un peu partout à pied, à cheval ou par n’importe quel moyen de transport disponible en des temps compliqués par une météo adverse, un monde mal connu et en ébullition et des amis politiques plus dangereux que ses ennemis, militaires entre autres. A part l’Amérique et les taxis hybrides, on n’a rien inventé de nettement plus frais deux gros millénaires après (se ? nous ?) dirait-on à Carthage.
Hannibal aussi était confronté à la « Rome » de son temps, aux mercenaires d’une guerre qui déjà était la poursuite du commerce par d’autres moyens et aux notables compliqués de son propre Sénat. A part le climat et les capitales des empires, rien n’a vraiment changé depuis 2000 ans et des poussières, (se ? nous ?) dirait-on à Carthage.
Hannibal aussi était confronté au fait éternel que les hommes ne sont que des hommes, à Rome et ailleurs où les chemins mènent. Ach, les ho(r)mm(on)es, toujours gross Malheur 22 siècles après (se ? nous ?) dirait-on à Tunis où on sait que de la roche de Solutré à la roche tarpéienne, il n’y a qu’un pas (surtout en jet privé) mais de nombreux hôtels.
Hannibal aussi « roulait » en véhicule importé à l’occasion, mais un bon éléphant musclé en armure pour traverser les Alpes, c’est plus glorieux qu’une limousine étrangère pour entrer dans l’Histoire. « Le made in France, vaste programme », (se ? nous ?) dirait-on à Tunis où on a de l’humour et connait bien le sujet de la délocalisation d’emplois français.
C’est il y a à peine un an, le 17 décembre 2010, que Mohamed Bouazizi, jeune vendeur ambulant de légumes, s’est immolé. C’est peut-être en se souvenant des occasions perdues d’Hannibal qu’en Tunisie, on est cette fois parvenu à rester sur un chemin d’avenir et à faire émerger via des élections pas trop contestables ce que les observateurs optimistes, et personne n’a les moyens d’être pessimiste ces jours-ci, qualifient de possibilité de « démocratie musulmane du 21è siècle » par une analogie d’autant plus excitante qu’elle est un peu osée, avec les démocraties chrétiennes de l’Europe du siècle précédent. A Tunis, on regrette sûrement de ne pas avoir trop le temps de relire Astérix pour retrouver dans lequel on dit « Delenda est Cartagho », de se poser des questions genre « #Europe or not #Euro », ni de se demander si le Royaume-Uni ne serait pas plus Atlantique que Méditerranéen, ni même de vérifier le pourquoi du comment du retrait du Canada (par ailleurs assez exemplaire dans ses réformes et son adaptation au monde nouveau bien que partiellement francophone ce qui ouvre des perspectives pour la Tunisie) du protocole de Kyoto alors que l’encre du vrai-faux accord de Durban n’est pas encore sèche. Mais comme tout le monde, on (se ? nous ?) dirait que si personne n’a de meilleure idée crédible que l’Europe et la démocratie pour assurer la paix et la prospérité, il semble préférable de ne pas jouer avec le feu même s’il fait un peu froid, même avec des brindilles de jasmin et que tant qu’à avoir traversé 2011 sans catastrophe, il faudrait commencer à remonter, avec ou sans éléphants, veaux, vaches et autres couvées.
©2011 Renaud Favier – renaudfavier.com – musique ! – 13 décembre 2011
PS : la saison n’est plus au passage des cols des Alpes en éléphant made in sûrement pas en France, ni même en vélo made in certainement loin du circuit du Tour de France (dont les voitures officielles étaient bien entendu made in elsewhere l’été dernier), et comme on n’a sauf erreur pas (encore ?) délocalisé d’usines françaises de skis en Tunisie (mais en Thaïlande, grande nation de sports divers, plutôt spécialisée en ski nautique ces derniers temps) qu’on pourrait relocaliser devant les caméras, les éléments de langage du discours du Président à Sallanches ne feront probablement pas référence à Hannibal d’autant que ça risquerait de valoriser des éléphants en pleine pré-campagne électorale, ni à la parabole du fils prodigue pour laquelle on attendra la messe de Noël ou le ralliement de Bayrou (quoique ses voyages en Audi brouillent son image sur le made in France) et de Villepin. Cela ne dérangera pas les skieurs qui profitent de la neige enfin arrivée dans les Alpes malgré le réchauffement climatique dont on a décidé à Durban qu’il est urgent de s’occuper plus tard. Ni les délocalisateurs y compris les fabricants de skis qui pourraient finir par trouver plus pratique de fabriquer des planches (en en réservant 4 pour l’emploi, mais c’est une vieille histoire, aussi, comme celle de l’industrie de la chaussure, notamment de ski, made in France ou de la dernière petite fabrique française de bérets pour les chasseurs alpins et autres amateurs) près d’un port de mer au soleil de frais de chauffage du fart plus modestes qu’en Europe de l’Est, où les employés parlent mieux français qu’en Asie et où ils bossent comme chez les ex-communistes le temps qu’il faut aux salaires qu’il faut en dehors de la zone monétaire difficile pour être raisonnablement compétitifs en dehors des boutiques de luxe des stations pour riches étrangers (les riches exilés skient plutôt en Suisse ou en Autriche pour ne pas empiéter sur les 6 mois et 1 jour à passer à l’étranger pour le fisc). Ni les Tunisiens, y compris les chômeurs, qui écouteront leur Président … Marzouki en espérant qu’il saura aussi se battre pour l’emploi de ses concitoyens (gagnant-gagnant, je vous ai compris …).
C’est fini pour aujourd’hui, parce que même en décembre, même s’il neige, il faut cultiver son jardin. Même (made ?) en France.
Et twitter un peu. Même (made ?) en Tunisie.













Ping: Mad in France ! Qu’en dirait-on … au Maroc ? | Renaud Favier : Café du matin à Paris