D’habitude, il faut être mort, ou au moins mort-vivant, ou bien très friqué ou über à la mode, pour être honoré(e) genre prix ce(ux)ci, médaille de ce(ux)-là ou admission à tel ou tel club chic pour intellos de choc, ou bien avoir produit une oeuvre ou publié des travaux tellement incompréhensibles que personne n’ose dire que c’est du charabia ou juste n’importe quoi inutile à la civilisation voire toxique pour les vrais gens vraiment normaux (la crème de la crème des anciens d’écoles de commerce sérieuses n’ayant pas séché les cours de déconomie et autres ingénieurs manquant d’imagination ou ayant dû nourrir jeunes une famille et devenus financiers dans un épisode dépressif se souviendront avec émotion du temps où on leur faisait avaler du Black and Scholes) …
Mais là, non, le gars Tirole qui écrit de manière compréhensible sur de vrais sujets sans langue de bois, ni snobisme corporatiste, ni surréalisme politisé déconnant (et pas 1000 pages pour juste une demi-idée comme l’autre à la mode depuis que celui d’avant, au demeurant plus convaincant, a fait une crise cardiaque en jogging à peine élu député …), a juste été enterré vivant à Toulouse (option MIT Boston, c’est pas non plus Pierre Rabhi plantant du goji bio au Sahel en vélo recyclable, le pépère) il y a une dizaine d’années pour avoir causé intelligemment et calmement de lutte contre le chômisme, et ça semble lui avoir réussi de ne pas passer son temps en cocktails parisiens agités, voire secoués, comme les piliers de think-tanks parisiens et autres politicien(ne)s autopropclamé(e)s génies des alpages de la prospective en rétroviseur genre le tandem des tchatcheuses Berger-Rabault, ou dans l’air confiné de cabines d’avions et chambres d’hôtels climatisées offertes par les éditeurs et organisateurs de conférences comme les vedettes de la déconomie littéraire sponsorisée en(tre) français à la Piketty.
C’est (un peu plus) frais (que d’habitude), sinon franchement révolutionnaire.
Ce qui est marrant, c’est que le jury Nobel ait récompensé deux Français dont le microcosme parigot et les universités d’été d’intellos ne disaient jamais un mot, ça va au moins permettre aux libraires de rafraichir leurs vitrines, et aux journalistes d’écrire un peu de papier frais, après une rentrée parisienne poussive, pas que du côté de la littérature (quant aux récupérations politiciennes, on n’a pas fini d’entendre des éléments de langage à la TV …).
Ceci twitté, félicitations aux deux gars qui honorent leur pays et rappellent le temps où Paris était une ville lumière sans trop d’abat-jours et où la France éclairait le monde sans se cacher derrière de vieux tabous, ainsi qu’aux autres lauréat(e)s d’une promotion #Nobel 2014 qui semble bien moins déraisonnable que d’autres.
Renaud Favier – 14 octobre 2014









Certes, c’est beau, c’est bien… il y a pourtant tellement de personnes « anonymes » qui mériteraient tellement plus ces prix ! Enfin ce que je dis …